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Sortir du cadre

Fuyant la critique " de Pere Borrell del Caso

Fuyant la critique " de Pere Borrell del Caso

Je suis resté 150 ans figé sur cette toile, prisonnier de ce cadre qui est aujourd’hui exposé dans un musée. Une jeune femme à la chevelure fauve et au visage constellé de taches de rousseur se tient face à moi et m’observe. Ses yeux bleu turquoise perçants et sa bouche aux lèvres fines la lui donnent beaucoup de charme. Elle semble à la fois pensive et ironique. Elle s’approche de moi. Je sens qu’elle a envie de me toucher. Elle y renonce. Elle sort de son sac une sorte de boitier lumineux. Avec un doigt, elle tapote dessus. Les humains de cette époque sont devenus fous. Soudain, elle se met à parler en plaçant l’écran devant son visage. D’une voix douce et claire, elle se lance dans un monologue :

— Tableau de 1874 fuyant la critique de Pere borell del caso. Ce portrait d’un jeune garçon du 19e siècle est saisissant. On dirait une photographie tant il est peint avec finesse. Il est assis sur un tabouret et fixe les visiteurs sans rien montrer de ce qu’il ressent, c’est un taiseux. Je crois tout de même deviner un soupçon d’ironie dans sa mimique comme si il se moquait du peintre et maintenant de ceux qui l’observent. L’artiste aurait dû le restituer un peu plus actif dans la gestuelle, expressif dans le regard et mieux l’habiller. Son côté froid et son aspect débraillé : pantalon retroussé, chemise ouverte, pieds nus le rendent pitoyable et antipathique.  

Mais qu’est-ce qu’elle raconte cette gonzesse ? Elle m’énerve, je vais finir par me fâcher. C’est peut-être ce qu’elle cherche.

Maintenant, elle lève son boitier, me toise, appuie dessus plusieurs fois. Elle observe ensuite son écran. Et je n’en crois pas mes yeux, je me vois dedans comme si je me contemplais dans une glace, mais en beaucoup plus petit. Inouï, en 150 ans, je n’ai pas vieilli. Je réalise qu’elle m’a tiré le portrait sans mon accord, ce qui déchaîne ma colère. Je sors du tableau, du cadre.

Sidérée, elle me regarde et continue à m’immortaliser avec son boitier. 

Je sors du tableau et du cadre et me jette sur elle. Je pose mes mains autour de son cou et commence à serrer. Le gardien du musée se précipite et parvient à me maîtriser. Des policiers arrivent, me passent les menottes et m’emmènent. Après avoir croupi dans des salles d’exposition, je vais me languir en prison et je n’aurais plus personne pour m’admirer.

Martine Martin / Inédit pour le défi 278 des croqueurs de mots animé par Gisèle (thème inventer une histoire à partir du tableau ci-dessous

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A
Les interférences dans le temps font tout le charme de cette histoire. Bises
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L
Une très belle nouvelle qui me plaît bcp ! J'aime ton imagination débordante autant que le personnage.... Waouuh ! Bravo ! <br /> bises Martine
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J
Trop sourcilleux et suspicieux le gamin ! le voilà bon pour un autre cadre ... bises et belle journée
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F
Ah§ le pauvre ! Mais il est trop coléreux ce gamin, même si on peut comprendre .
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F
Ah§ le pauvre ! Mais il est trop coléreux ce gamin, même si on peut comprendre .
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E
Changer de cadre n'appore pas toujours que des joies ! Merci pour cette drôle d'histoire. Bises
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E
Bonjour Martine. Ton récit est prenant et drôle. Une jolie nouvelle. Bonne journée et bisous
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M
La chute est très drôle voilà à quoi ça sert de vouloir changer de cadre, ça ne peut que mal se terminer :) Bisous et une douce journée
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R
Toujours autant d'imagination et une chute a laquelle je ne m'attendais pas! bisous bonne semaine
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J
Bonjour Martine, on sort du cadre et l'on te lit avec joie et ce tableau incroyable de Pere Borrell del Caso prend vie et tout sens grâce à ton texte ou les risques sont pris puisqu'on imagine ton personnage partir en prison suite à l'agacement du petit garçon fuyant la critique pour une raison plus pure .
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M
Bonjour Martine,<br /> Oui, ce tableau est stupéfiant de réalisme!<br /> Et ton texte en forme de fait divers agressif et fantastique est très amusant!<br /> Bises.<br /> Bon après-midi à toi,<br /> Mo
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.
J'espère que tu as bien fêté ton anniversaire ..............bonne journée ...froid en Alsace
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G
L'imagination est bien ici et on lit ton texte avec beaucoup de plaisir ! Passe une bonne et agréable fin de journée. Cordiales amitiés & à +
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A
Beaucoup d'imagination Martine ! <br /> Ah cette jolie rousse fait son malheur ! Ou son bonheur, sait-on jamais qu'il s'en sorte, rencontrant une personne ayant deviné sa maturité, son intelligence ; je le vois devenu réalisateur de films. <br /> Bises
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M
Tu n'arrêtes pas de nous surprendre !<br /> bonne journée<br /> bisous
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J
bravo Martine tu m'as bien bluffé avec ta chute on s'attend à la liberté du personnage et tu l'envoies en prison ! <br /> bises
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A
Triste fin, il méritait pourtant un bol de grand air !!!!
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J
Excellent Martine, j'aime beaucoup ton interprétation. Je suis en train de penser à toutes ces personnes figurant sur les tableaux, si elles se révoltent pour leur droit à l'image les gardiens des musées n'ont pas fini de se démener . <br /> Merci pour ta participation.<br /> Bonne journée <br /> Bises
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R
Waouh quel beau texte et belle photo, on a vraiment l'impression qu'il veut s'échapper...<br /> Belle journée Martine gros bisous
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A
Kikou Martine,<br /> Ouah, quelle imagination...<br /> J'ai adoré ton histoire et qui cadre assez bien avec ce tableau ! hi ! hi !<br /> Bonne journée bisous ♥
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Z
C'est excellent Martine, une belle suite de l'interprétation du tableau de Pere borell del caso... J'adore !<br /> Bises et bon début de semaine - Zaza
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D
Il a fini par se révolter après avoir été admiré pendant des années, il aurait mieux fait de se contrôler, la vie au musée est certainement plus agréable que la vie en prison.<br /> Je suis contente de te retrouver après ma pause.<br /> Très belle journée.<br /> bises
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C
En prison, il ne risque pas de se faire admirer ; c'est certain. Son manque de contrôle va lui faire regretter son tableau et son cadre, hélas ! C'est une bonne et belle histoire, Martine. Bravo ! Bonne journée. Bisous♥
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J
Eh bien dites donc, ce gamin n'a pas supporté cette femme d'un autre siècle et ses manières... Méfiance avec certains tableaux !! Bises jill
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